ENSEMBLE(S), mission presque impossible ?

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Par Clara Delétraz
23 mai · 7 mn à lire
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Les 2 enseignements qui m’ont menée à cette enquête

La dernière fois, je ne vous ai pas tout dit : au départ de cette “ enquête d’ensembles ”, il y a 2 prises de conscience que j’ai eues (et que je n’avais pas vu venir !) en accompagnant près de 12 000 personnes en quête d’épanouissement dans leur travail avec le programme Switch Collective (que j’ai co-fondé fin 2015 et quitté en 2022).

PRÉCÉDEMMENT DANS ENSEMBLE(S)
Retrouvez l’
épisode pilote (à lire absolument si vous nous rejoignez en cours de route !) pour comprendre de quoi traite cette enquête et ce qu’on va faire ENSEMBLE(S)


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Cher·e ami·e, cher·e inconnu·e,

Pour moi, tout a commencé comme ça : fin 2015, j’ai co-fondé Switch Collective, un bilan de compétences nouvelle génération fondé entièrement sur le collectif. Switch a accompagné près de 12 000 personnes, par groupes d’environ 25. Mon intérêt pour les dynamiques collectives est né de ce que j’ai observé pendant 7 ans (j’ai quitté le projet en 2022[1]).

Alors, vous me direz peut-être qu’on parle d’un ensemble de gens très homogène (25-45 ans, population métropolitaine, avec un niveau d’éducation en moyenne supérieur à Bac+4, 70 % des cadres…). Côté mixité, tu peux te brosser Martine. Mais quand même, ces gens ne se connaissaient pas au départ. Et arrivaient en à peine quelques semaines à devenir des collectifs ultra soudés pour répondre à un questionnement au départ tout à fait personnel. 

Une " promo " en plein programme Switch en 2018Une " promo " en plein programme Switch en 2018

Vous me direz peut-être aussi qu’il s’agit d’un tout petit échantillon à l’échelle de la France et du monde. Mais c’est un échantillon représentatif d’un groupe qui a un fort pouvoir de prescription et d'entraînement : de fait, en quelques années, le phénomène de la quête d’épanouissement dans le travail a infusé toute la société. 

Avoir été aux premières loges de ce mouvement de société et au contact de ces quelques milliers de personnes m’a appris 2 choses fondamentales (pas forcément celles que j’aurais imaginées au départ) qui m’ont menée à cette enquête.

🤓 Enseignement #1 : quête de sens dans le travail, et si on faisait fausse route ?

La quête de sens dans le travail et les reconversions-passion ont infiltré nos imaginaires. Dans les médias, les portraits de cadres en costard-cravate qui passent un CAP cuisine ou deviennent fromagers font rêver (et font vendre). C’est même devenu un nouveau marqueur de réussite : comme titrait Le Monde en mars 2022, “Si à 40 ans t’as pas fait ta reconversion, t’as raté ta vie ”

Mais je vous avoue quelque chose : ce “ phénomène de société ” a fini par me mettre mal à l’aise. 

Oui, parce que ça met le travail au centre de tout. Quelque chose qui devrait nous fournir un revenu, une identité, un statut, une appartenance, de l’épanouissement, une manière de nous “ réaliser “, un sens. Voire une transcendance (certains parlent même de “religion du travail”[2]). Mais est-ce vraiment au travail de nous donner ce sens ? 

Bien sûr, l’envie de porter ses valeurs à travers son job, d'être aligné·e avec ce que l'on fait, de vouloir se sentir utile sont a priori une bonne chose pour soi et pour la société. Mais ça contribue aussi à nous maintenir dans une roue qui ne s’arrête jamais de tourner et à faire converger toutes nos aspirations vers le changement et la réussite individuels. Y compris quand cette réussite passe par  l’expression de son identité et le sens.

Mais si en cherchant du sens au travail, on cherchait en fait autre chose, sans s’en rendre compte ?

Vous connaissez peut-être cette étude de la Harvard Medical School (the Adult Development Study) menée pendant plus de 85 ans (qui a suivi 724 personnes depuis 1938, encore en cours aujourd’hui avec leurs descendants) pour tenter de répondre à cette question : qu’est-ce qui rend les gens heureux et en bonne santé ? L’argent, la célébrité ? Évidemment non, ça on le sait. Le travail ? Non plus, on s’en doutait aussi. Et pourtant regardez le temps, l’énergie et la symbolique qu’on y met. Regardez le temps qu’on passe sur LinkedIn à se raconter nos exploits professionnels (ou à complexer à force de lire ceux des autres) !

La réponse, vous la connaissez sans doute mais je crois qu’il est bon de se la rappeler, encore et encore : ce qui nous maintient heureux et en bonne santé, c’est la qualité des liens qu’on entretient les uns avec les autres. À la fin, ce qu’ont en commun les participants de l’étude d’Harvard qui sont en bonne santé et se déclarent heureux passés 60 ans, ce sont des liens amicaux et familiaux solides, mais aussi des contacts sociaux forts dans des groupes de parole, des associations, des collectifs. Nulle part il n’est question d’un travail qui leur permet de se “ réaliser ”.

🤓 Enseignement #2 : notre quête de sens est, au fond, une quête de liens

Alors ce que je retiens de l’impact du programme Switch sur tous les gens qu’on a accompagnés, ce n’est pas tant de leur avoir permis de changer de job ni même de (re)trouver de l’épanouissement et du sens au travail. C’est autre chose… Quelque chose qui n’a cessé de m’étonner toutes ces années et qui est directement en lien avec l’enjeu de cette enquête (car vous vous dites peut-être qu’avec ces histoires de quête de sens au travail, je m’égare : je vous promets que non !). 

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